Monthly Archives: décembre 2020

 Nicolas Debon ancien étudiant de l’école de 3D Studio Mercier, est actuellement chez Fortiche Production. Il a travaillé pour des studios comme Illumination ou Fortiche Production 

 

As-tu toujours voulu être animateur ?

Alors non, je n’ai pas toujours voulu être animateur. Je me rappelle juste que quand j’avais 9 ou 10 ans, je m’amusais dans des carnets de croquis à faire des sortes de batailles Star Wars en animé. Je représentais des vaisseaux de manière très schématique (Un rond et deux barres sur les côtés, comme ceci un peu : |-O-| ) Et de page en page je les faisais bouger et tirer des lasers avec des feutres de couleurs vert et rouge, en fonction qu’ils soient gentils ou méchants. Et en tournant les pages, l’animation « fonctionnait »

Sinon, non, ce n’est pas le genre de métier auquel on pense petit, ni même au lycée. Il n’y a qu’à voir la surprise des professeurs quand on leur annonce que post bac, on va faire une école de 3D.

Par contre en arrivant au Studio Mercier, oui je savais que c’était pour de l’animation. Le reste ne m’intéressait pas spécialement.

 Quel a été le premier gros projet sur lequel tu as travaillé ?

Ça dépend ce que l’on appelle par gros. Le premier gros projet, c’est « Le Grinch » à Illumination. Le plus important cependant a été « Animal Crackers », à Blue Dream Studio (qui n’existe plus…) à Valencia, en Espagne.

La qualité est certes moindre de ce que l’on peut trouver à Illumination ou dans d’autres studios de cette qualité, mais je savais qu’en entrant là, la démo que j’allais avoir en sortant me permettrait de pouvoir intégrer des studios comme Illumination justement. Et le projet était très agréable. Il sort bientôt sur Netflix avec 3 ou 4 ans de retard et il a d’après moi déjà un peu mal vieilli, mais en tant qu’animateur c’était franchement que du bonheur.

 Tu voyages beaucoup, quel est l’endroit où tu te sens le mieux pour travailler ?

Sans hésiter, Valencia en Espagne. C’est dommage que Blue Dream ait fermé. Il y a quelques petits studios, qui font de la série, et d’autres comme la Tribu qui se battent pour avoir des projets intéressants, mais cela reste instable. Quoiqu’il en soit, j’y retournerai très prochainement, définitivement j’espère, en essayant de travailler en freelance pour ma boite actuelle ou pour d’autres, voire en m’associant à d’autres animateurs de là-bas que je connais depuis mon passage à Blue Dream, pour pourquoi pas monter un petit studio d’animation, pour participer à des projets internationaux en collaboration avec d’autres studios, comme cela se fait, et va se faire de plus en plus.

L’Italie était vraiment un chouette endroit aussi. J’étais à Savona, et le studio se trouvait dans un port de plaisance. La vie était très agréable. Et bien évidemment à la Réunion, chez Pipangaï, où en plus de la mer, de la chaleur et du cadre paradisiaque de certains endroits, il y avait le fait que les gens qui travaillent là-bas le font pour une courte période, comme 6 mois/1an, loin de toutes leurs attaches, et cela donne rapidement un coté colonie de vacances, où l’on fait tout ensemble.

 Peux-tu nous parler de ton expérience sur Le Grinch ?

Paradoxalement, bien que ce soit un grand projet prestigieux, c’était vraiment pour ma part comme si, comme ça. La production était fluide (ce n’est pas toujours le cas), les gens cools, on ne ressentait pas trop de pression comme cela peut l’être sur les Minions, mais je ne sais pas, je n’étais pas très confortable.

Je préfère cependant parler de mon expérience en cours. Je suis actuellement chez Fortiche, où l’on bosse sur Arcane, la série de League of Legends. Là, c’est vraiment génial. La qualité est certes moindre qu’à Illumination, mais reste tout de même de très très bonne facture. C’est une série un peu plus adulte, pas cartoon, et le type d’animation est un peu différent de ce que l’on a l’habitude de faire. Individuellement, on a plus d’impact. Nos choix sont écoutés et respectés, on peut se permettre d’apporter notre patte, ce qui est plus dur dans les gros studios, où ils savent exactement ce qu’ils veulent.

L’ambiance est excellente, et tout le monde a l’impression de participer à quelque chose de précurseur. On sent qu’il se passe quelque chose, je ne sais pas trop comment l’expliquer

 En quelques mots en quoi consiste une journée type pour un animateur ?

Vraiment classique. Comme n’importe où j’imagine, le matin on arrive, on parle avec sa team, on check ses mails, on se met sa musique ou ses émissions de radio préférées…

Puis on anime, on a des réunions avec le directeur d’animation où on lui présente notre travail, puis avec le réalisateur de la série. On se film également beaucoup pour avoir des références, voir des petits gestes naturels que l’on peut rajouter à nos animations.

 Quel conseils donnerais-tu à un jeune animateur ?

Déjà ne pas se décourager, ça peut être frustrant au début. Et même si l’on a du mal à trouver un job au début, continuer d’animer.

Ne pas hésiter à se filmer, et vraiment regarder objectivement image par image ce qu’il se passe dans son mouvement. (Par exemple : Là, pendant 2 frames la tête penche à gauche, puis revient un petit peu à droite, puis soudain 3 frames après brusquement en avant). Il ne faut pas recopier pour recopier, mais parfois avec des mouvements de tête, de main, vous obtiendrez de supers résultats en les insérant dans vos anims.

Je me rappelle qu’une fois, je ne comprenais pas trop comment on pouvait avoir des résultats cools en cartoon, et j’avais perdu quelques jours à recopier une animation qui me plaisait, pareil que quand on se film, de manière objective, et ça m’avait beaucoup apporté.

Ne pas hésiter à trouver des petits studios, même à l’étranger. J’ai un parcours un peu chaotique, mais qui vu de là où je suis maintenant, est beaucoup plus fun que si j’étais rentré à Illumination directement. J’ai travaillé en Slovénie il y a plus de 5 ans, et j’y suis par exemple retourné voir un ami qui était mon coloc en début d’année. J’ai eu un coloc Québécois à Angoulême que j’ai revu 3 ans après. Tout ça pour dire qu’il ne faut pas hésiter à prendre des chemins un peu bizarres, qui paraissent être une perte de temps si l’on veut finir chez Disney. Vous aurez toujours du bon à y trouver.